Tor des Géants : un voyage dans l'inconnu !!
Lieu : Courmayeur (Val d'Aoste)
Date : du 7 au 14 Septembre 2014
Distance : 330 km
Dénivelé : 24.000 D+
Beaucoup de courses, de voyages, d’errances en France, et quelquefois ailleurs, vécus avec, pour finalité, d’être posé sur une page de ce blog en guise de partage… plus ou moins proche de la réalité, de la vérité, de l’émotion vécue. Faire un CR du Tor peut paraître aisé mais est de mon point de vue une chose totalement impossible.
Une épreuve hors norme pour des émotions XXL. Nous ne
parlons plus de course, tant la distance est belle et le dénivelé exaltant mais
de voyage. Un voyage où le temps n’a plus prise, où les repères disparaissent,
où l’écoute de son corps devient la clé de la réussite, les moindres maux
sont à prendre au sérieux. La méfiance et la retenue deviennent alors des notions
primordiales.
Tout simplement incomparable. Alors ce CR, ainsi que la vidéo vous en montreront pas mal, et j’espère qu’il vous séduira. Mais on ne raconte pas le Tor, on le vit !!!
Tor des Geants 2014 from sonicronan on Vimeo.
Tout simplement incomparable. Alors ce CR, ainsi que la vidéo vous en montreront pas mal, et j’espère qu’il vous séduira. Mais on ne raconte pas le Tor, on le vit !!!
Tor des Geants 2014 from sonicronan on Vimeo.
Courmayeur - Dimanche 7 septembre 10:00
Personnellement tout va bien, le passage au refuge Deffeyes est le
premier moment vraiment marquant de la course. Charmant refuge caressé par l’énorme glacier du
Ruitor, une
nouvelle fois bondé de valdotains surexcités. Concernant cette ferveur populaire, je la comparerai aisément avec le
Grand Raid de la Réunion. Ce sont des lieux où la course transporte
littéralement la population locale, indescriptible !!
Valgrisenche - Dimanche 7 septembre
20:10 – 49km 3996D+
Direction le col fenêtre, les sentiers se font plus ardus, plus pentus, le fait de ne pouvoir manger rend la progression plus difficile. La fenêtre correspond à cette petite ouverture taillée dans la roche et plongeant de manière vertigineuse sur une nouvelle vallée à conquérir. Nous entrons de plein pied dans le parc national du grand paradis guidé par une lune pleine de bonnes intentions. Les 3000m sont atteint au passage du col Entrelor auquel succède le col loson, après plus de 3h d’ascension, situé à 3300m et point culminant de la course. Le jour se lève, le panorama est splendide et la contemplation de mise. La descente est agréable et Cogne se dévoile enfin.
Cogne - Lundi 8 septembre 2014 09:50
– 105km 8137D+
Donnas - Lundi 8 septembre 2014 20:42
– 149km 11.485D+
Au programme une douche rapide puis premier petit massage des
quadris. Sieste d’une heure suivie d’un léger repas. Je
m’alimente à nouveau et ça c’est cool, je recharge le sac en nourriture et en
eau. Nouveau change et tournée de NOK. J’embrasse les parents et repars plein
d’entrain.
Mais Donnas n’est pas un lieu que
l’on délaisse aisément, et j’ai rapidement l’impression de me perdre dans ses
méandres. Entre le pont Moretta, le pont Saint-Martin décoré de mille
feux (la légende veut qu’il soit bâti par le diable), les énormes marches
d’hauteurs très inégales et le passage dans les vignes, la progression est
lente, très lente. Nous sommes dorénavant sur la haute route n°1 et ceci
n’est qu’un avant-goût de ce qui m’attend.
J'arrive enfin à Gressoney (quatrième base de vie).
Petit coucou devant la webcam en direction de mon coeur que je sais derrière
son ordi prête à débaucher, 17h37 quand même... Excellente idée ces webcams.
Les parents sont présents et me sont d'une aide non négligeable dans les bases
de vie. Ils me portent les sacs, m'apportent les repas, mobilisent les masseurs
ou médecins si nécessaires, me
réveillent en cas de sieste... Autant d'attentions qui me permettent de
récupérer un maximum.
Gressonney - Mardi 9 septembre 17h37 - 202km 15.592D+
Les cuisses me tiraillent encore légèrement,
un nouveau passage entre des mains expertes s’imposent. Puis direction le
dortoir, pratiquement vide, pour une petite sieste. Aussitôt allongé mes
paupières se ferment, maman me réveille 2h plus tard avec l'étrange
impression d'avoir simplement cligné des yeux. C'est à ce moment précis que ma
course change de physionomie, elle m'indique que Ronan vient d'arriver dans la
base et qu'il est parti se reposer 2 petites heures, dehors il pleut des
cordes. Nous sommes au même instant dans la même base à plus de 200 km du
départ, Il m'est alors impensable de continuer sans lui... Et je repars pour 2
nouvelles heures de sieste. Avant de quitter Gressoney nous accordons avec plaisir une interview à un journaliste
couvrant l'évènement.
Un peu moins de 6h de pause et nous
repartons ensemble... Pour une échappée que nous souhaitons aussi belle que
l'année dernière. Nous savons que courir
ensemble nous rend certainement plus serein et donc plus fort pour affronter ces
130 derniers kilomètres. A Alpenzu,
le même journaliste italien à la mémoire de poisson rouge nous pose les mêmes
questions que 2h auparavant, auxquelles nous répondons de la même façon, évidemment. Les refuges semblent de plus en
plus agréables et donc plus difficiles à
abandonner. La nuit est une nouvelle fois clémente et nous offre des panoramas exceptionnels...
Imaginez-vous gambader dans les pâturages valdotains, vous demandant si la
frontale est d'une quelconque utilité tant la lueur de la lune est éclatante,
avec en toile de fond le Mont-rose bordé de ces énormes glaciers. Et bien on se
sent petit, très petit... mais rempli d'un profond bien-être.
Nous évoluons sur le grand sentier Walser.
Les cols Pinter, Nana ou encore celui des fontaines se succèdent sans grande
difficulté dévoilant des vues imprenables sur le Cervin (l'un des 4 géant avec
son pic pyramidal si reconnaissable). Le
pied gauche me lance légèrement et je sens qu'une ampoule se forme
sournoisement à la base des orteils, ce sera ma croix sur cette fin de
parcours.
Valtournenche - mercredi 10 septembre 09:56 - 241km 18.193D+
Terminé les massages, le mal est
ailleurs... Nous cherchons désespérément un podologue, malheureusement pas de
podo, mais un médecin pas vraiment expert, ni sympathique d'ailleurs. Il enlève
l'infection à base d'une seringue mais ne désinfecte pas, rajoute un compeed...
Je reste dubitatif. On s’accorde une heure et demi de sieste avec le
frangin. Au réveil Jojo et Gigi accompagnent les parents, malgré l'abandon (lourde
chute avec fracture d'une côte) Georges
est bien présent pour nous supporter et nous décrypte la suite du parcours
qu'il connait si bien.
Sans trop en parler avec Ronan nous
adoptons une technique de progression qui nous convient parfaitement. Je pars
devant lors des ascensions puis bascule rapidement, sans l'attendre, dans les
descentes, avant de revoir sa bouille de Warrior à mes côtés quelques centaines
de mètres plus bas.
Après le col Terray la température commence à se rafraîchir. Nous abordons
le refuge surchauffé de Cuney à 19h.
Le contraste est trop fort et nous nous accordons une petite demi-heure de repos.
Un dortoir dont je rêve encore tellement la sensation de confort et de quiétude
était présente. Résultat des courses, on demande une demi-heure supplémentaire
lorsque le préposé au réveil s'acquiert de sa tâche. Une demi-heure plus tard,
toujours impossible de bouger, nous sommes amorphes et c'est en se faisant
violence que l'on finit par lever nos ptits culs de la couche.
Assez mal gérée cette histoire car
nous repartons vers 21h saisis par la fraîcheur de la nuit. Nous atteignons Oyace vers une heure du matin. Je crois
que Katell était belle et bien présente pour nous encourager à cette heure
avancée de la nuit, ou bien était-ce une nouvelle hallucination !
Col bruson dans la pénombre, puis la descente
vers Ollomont dévoilant une nouvelle
ampoule au niveau du talon, et de 2.
Ollomont - jeudi 11 septembre 05:27 - 285km 20.895D+
Pas mal de monde pour nous accueillir
et malgré cela le moral n'est pas au beau fixe, je souffre de plus en plus et
toujours pas de podo. Nouveau toubib, bien plus sympathique qui constate les 2
ampoules et l'ampleur des dégâts. Il fait le plein de la seringue mais toujours
pas d'éosine ni de bétadine pour stériliser. Nouveau compeed, strap puis nok...
Je suis toujours aussi sceptique. Je pars m'allonger à l'étage pour une
nouvelle heure et demi.
En redescendant Katell m'indique une
ardoise sur laquelle est inscrite une liste de plats tous plus succulents les
uns que les autres. On se régale... Dernier entracte avant ce final. Le rideau
s'ouvre sur une nouvelle journée ensoleillée.
La montée du vallon de Champillon est peu raide jusqu'au refuge Letey (2297m), puis la pente se redresse un peu jusqu'au
col. La partie que j'appréhende le plus arrive alors, une longue descente
d'environ 12km sur St Rhémy-en-bosses.
La douleur est vive et courir me semble impossible. Au final, je fais pas mal
de rencontres intéressantes qui me rendent le calvaire moins pénible. Tout
d'abord Maddy l'espagnol, basque de surcroît avec son T-Shirt Ehunmilak,
arborant toujours son large sourire. Nous ne cessons de nous encourager lors de
ce chassé-croisé. Il y a également cet espagnol qui contrairement à Maddy a
perdu son sourire dans la montée de Champillon estimant que cette partie plate
ne représente pas l'esprit du Tor. La douleur au genou qu'il supporte depuis
trop longtemps le rend amer. Tout à coup il me prend mon bâton, voit l'autocollant du profil collé dessus,
s'arrête et hurle que c'est une idée de génie, point de vue que je partage
aisément.
Sur la route forestière je rencontre les parents annonçant l'arrivée proche sur St Rhemy.
Les derniers lacets du col de Malatra sont vraiment raides. Son
passage marque la fin du périple, une dernière descente et on y sera. On se
congratule tout en admirant le massif du Mont-Blanc. La descente sur Bonatti reste douloureuse. Le ravito du
refuge est top, ils font des croque-monsieur, on hallucine avec le frangin. En
fait c'est celui d'un bénévole mais devant nos faciès de crève la faim il
accepte de nous l'offrir généreusement.
On repart vers Bertone, je cours à nouveau avec entrain. En l'absence de rubalises
un léger doute s'empare de nous, il n'y a pourtant qu'un seul chemin. Les
coupables : des vaches... L'herbe des verts pâturages n'est rien comparée à la
saveur exquise d'une belle rubalise jaune "TDG". A Bertone on nous
annonce Courmayeur à moins d'une heure.
50 minutes plus tard nous y sommes.
Nous apercevons Katell venue en éclaireur. Il est 21h45, nous levons les bras
pas peu fiers de notre petite balade familiale. Ils sont tous là, l'émotion est
palpable et se lit sur les visages, nous
l'avons fait !
Courmayeur - jeudi 11 septembre 21:45 - 333km 23.775D+
Dans la catégorie "pas
d'choune" je nomme Gex, Jé et Romain, des copains de Ronan partis
directement après leur taf et ratant notre arrivée pour 5 petites minutes.
Une belle pensée à ma tribu qui était
tout en moi durant ce "viaggio". Les minettes étaient mes jambes,
Titou le petit ange qui me soufflait à l'oreille "on court Papa... on
court" et évidemment Caro, mon coeur, mon moteur dans cette aventure.
En attendant la somptueuse remise du dimanche, place à la récupération,
au partage. Les arrivées se succèdent dans le centre-ville de Courmayeur. Le finish
délirant et théâtral de nos 2 grands couillons de sénateurs, le yéti violet
enchainé et dressé par un Arsim revanchard… Excellent !Et évidemment Bob menant à bien son petit Tor à Léon, d’une régularité surprenante et sans aucun problème physique, chapeau bas Monsieur !!!
Merci à tous pour votre générosité, la collecte qui atteint des sommets inespérés. Merci à nos accompagnants, amis et famille sur le parcours, à toutes les personnes qui nous ont suivis durant ce périple (FB, suivi TTT, suivi kikourou...). Tous ces témoignagnes qui nous nouent un peu plus l'estomac !!!
Merci Arnus pour ce rêve, et au delà.
RépondreSupprimerTu es vraiment plus fort que la douleur, rien ne peut t'arrêter.
Vivement de te retrouver sur les sentiers
Krem
Bravo Arnaud!!
RépondreSupprimerSuper CR
Ça donne vraiment envie. Peut être pas si long mais toujours dans de vastes et beaux paysages avec de belles rencontres.
Bravo à vous deux.
Bbno