UTMB 2007

Lieu : Chamonix
Date : 24-25-26 août 2007
Distance : 163 km
Dénivelé : 9400 D+
A papy et Mamy,
Tout commence 2 ans auparavant quant à la suite de la diagonale
des fous nous nous promettons avec Pascal et Raf de tenter le tour du
Mont-Blanc en 2007.
Nous repartons ensuite aux Houches avec les minettes, histoire
de prendre nos quartiers. Dans l’après-midi derniers achats avant le départ,
une première peau de chez Falk que je n’hésiterai pas à tremper et un caleçon
technique permettant d’éviter tout risque de frottements. Dans la soirée, aux
alentours de 18h nous partons à la micro-brasserie où nous attend le team
RAIDLIGHT. Petit bonjour à Benoît et Alexandra, petite mousse, passage éclair
avec les minettes puis dernière grosse nuit avant le D-Day.
V 18h15 – Les parents ne sont toujours pas là, j’embrasse la
famille, et me place pour le départ. Je retrouve – par grand hasard - Raf, que
je n’avais pas vu jusqu’alors. Je prends des nouvelles, ça à l’air d’aller. Les
paroles de Catherine et Michel Poletti concernant notamment leur fils ainsi que
Werner Schweizer ne font qu’accroître l’émotion du moment.
V 20h56 – Saint-Gervais - On se serait alors cru à la montée de
l’alpe d’huez sur le tour de France, une foule énorme, des cris, des cloches,
des drapeaux, des encouragements, des mains d’enfants à taper. Des frissons me parcourent
l’échine, je suis bien… Passage ensuite des Contamines (km 30), on y retrouve
la même euphorie avant de s’engouffrer doucement dans le calme de la nuit, les
écarts commencent à être perceptibles. Je rentre alors sereinement dans une
sorte d’introspection très agréable.
V 23h27 – La Balme – Ravitaillement très sympa, moment de
réconfort dans la dureté de la
nuit. Cette nuit qui génère une excitation particulière,
exacerbe la «porosité» du coureur avec le paysage. Il faut s’habituer à
l’obscurité seulement percée des frontales, si par chance on n’est pas trop
isolé, lire avec la lampe et à la pointe de la chaussure, se couvrir assez mais
pas trop, avec en fond sonore le bruit du torrent et des bâtons sur les pierres
du sentier. Passage à la croix du bonhomme (Alt 2479). Arrivée au premier gros
ravitaillement des Chapieux, tout va pour le mieux, je ne m’attarde pas. Col de
la Seigne (alt 2516) et le passage en Italie, petit vin chaud en guise de
bienvenue avec des bénévoles très conviviaux qui en auraient peut-être abusés, redescente
sur le refuge Elisabetta.

S 06h07 – Arrivée à Courmayeur, environ mi-course. Nath et Ron’s
sont exacts au Rendez-vous. Une petite douleur sur le devant du pied me fait
craindre un début de tendinite !!! Je récupère mon sac coureur, échange le
caleçon long contre un short et troque la première peau contre un t-shirt. Un
petit massage pratiqué avec soins par les étudiants d’Orléans. Je fais la
connaissance d’une jeune étudiante de Villandry qui me dit connaître la célèbre
côte de l’épan, où je passe le plus clair de mon temps à m’entraîner. Je prends
alors conscience que l’état de fatigue de l’instant me fait dévoiler mes plus
grands secrets. Je termine ce séjour à Courmayeur par un petit repas chaud.
Après 45 minutes de pause je repars sans oublier d’embrasser mes fidèles
accompagnants. Sortie de Courmayeur, le jour se lève sur une nouvelle journée
d’effort et de sublimation. La lumière du jour commence à recolorer le paysage,
les cimes rosissent, et les alpages s’étendent à perte de vue.
S 11h06 – Grand col ferret (Alt 2537). Ce col se situe à la frontière entre
l'Italie et la Suisse,
aux premières loges pour admirer les Grandes Jorasses. Ce paysage si bien décrit par Frison Roche, comme «un jaillissement de glace et
d’aiguilles de granit, de hauts sommets cristallins, des veilles roches
découvrant un paysage d’une exceptionnelle beauté». Ce n’est pas
parce qu’on court qu’on ne savoure pas le paysage. Dans une descente, je
rejoins Karine Herry qui m’avoue vouloir abandonner à Champex (plus de jambes,
ampoules aux pieds), je l’encourage tant bien que mal. Il lui en restait
effectivement pas mal sous le pied, car elle terminera troisième féminine.
S 16h48 – Bovine. C’est alors que le mal de cuisses atteint son
paroxysme, la marche prend alors le pas sur la course, les relances deviennent
minimalistes. Plus rapide en descente, c’est à son tour de s’accrocher à mes
basques. Col de la Forclaz - Quelle surprise d’apercevoir toute la famille
venue à ma rencontre, les bières toujours de sortie, les minettes sont enfin là
accompagnées des parents et bien sûr Nath et Ron’s. Ces encouragements me
donnent le courage d’attaquer la longue montée des Tseppes toujours accompagné
de Philippe. Même tactique que pour Bovine, lui devant à la montée puis moi
dans la descente – quelle complémentarité… Le mal aux cuisses est toujours
aussi insupportable. Nous repassons la frontière peu avant Vallorcine, nous
revoici donc en France, la fin est proche. Vallorcine (km 147), plus que 16 et
cet anneau magique sera enfin refermé. Je me mets alors à pratiquer la méthode Cyrano qui
consiste à alterner 10 mn de course avec 1 mn de marche. A mon grand
étonnement, la proximité de l’arrivée me redonne des ailes, les jambes lourdes
des 25 derniers km disparaissent comme par enchantement. Les relances sont de
nouveau au goût du jour malgré l’obscurité grandissante.
S 21h15 – Argentière. Dernier ravitaillement avant l’arrivée, il
reste 10 km .
Tout va bien, l’excitation d’en finir me donne une motivation supplémentaire. Les
jambes tiennent. Dans ce dernier tronçon je double Philippe qui – désireux de
battre son temps de l’année dernière - m’avait distancé à Vallorcine. Et c’est alors que le coureur espagnol – vous
savez celui du début qui a donné rendez-vous à sa copine à 22h30 – me double à
grandes enjambées. Le pire dans cette histoire c’est que je savais qu’il allait
me doubler un moment ou à un autre. S’il ne l’avait pas fait, j’aurai presque
été déçu…
S 22h34 – Chamonix. Puis ce sont les derniers lacets dans les rues
de Chamonix. Tant d'acclamations, de bonheur affiché, j’en prends un maximum et
en stocke même pour des années …J’étais tout simplement HEUREUX !!! Quelle sensation
pour cette arrivée, toute la famille réunie. Je récupère Anaël et Lou-Ann pour
cette dernière ligne droite, tellement rêvé, désiré, et enfin accessible…
l’émotion me gagne doucement, et c’est les yeux larmoyants avec les minettes
dans les bras que se termine ce magnifique périple.
D
06h45 – Arrivée de Pascal après 36 heures de course. C’est en levant un bras
rageur lors du passage de la ligne que se termine son UTMB. Comme à la Réunion,
nous nous congratulons avec une fierté non retenue. J’apprends alors l’abandon
de Raf à Courmayeur, plus de jus… Nous le retrouvons un peu plus tard dans la
matinée avec Pascal, une certaine déception se lit sur son visage. Les arrivées
s’enchaînant ne font qu’attiser ce sentiment. Dans
une telle course, il y a tant de raisons qui peuvent nous empêcher de finir...
J'espère très fort pour lui qu'une prochaine fois, le bonheur de prendre le
départ sera complété par celui de franchir la ligne d'arrivée...
Parfois, il suffit de se remémorer comment la vie
professionnelle se plaît à piéger les rêves, à dissoudre les énergies, pour
juste retrouver le bonheur d’être seul aux commandes pendant quelque 163 km . Au-delà des 100 km , on est en quête de
limites humaines physiques et mentales, d’une forme d’accomplissement, comme
dans l’expérience artistique. On ne court pas contre les autres, c’est plutôt
un dépassement de soi qu’on va chercher.
C’est une course magnifique, ce parcours autour du
Mont-Blanc est mythique!
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